Myriam Aït Amar, éloge de la simplicité

Myriam Aït Amar fait glisser la terre entre ses doigts comme d’autres manient à la perfection la plume ou le pinceau. La céramique est entrée dans sa vie comme une évidence, et la créatrice se consacre aujourd’hui pleinement à sa passion. Son travail raconte l’héritage familial, mais aussi son amour pour l’imperfection et ses origines berbères. A travers ses luminaires et pièces de vaisselle, Myriam Aït Amar nous invite tout en douceur dans son univers, teinté de poésie et de belles matières !
Comment avez-vous découvert le monde de la céramique et de l’artisanat ?
J’ai toujours été quelqu’un de très manuel. Mais je vis malheureusement dans une société qui pense que créer des objets artisanaux n’est pas un métier viable… Jeune adulte, j’ai donc opté pour une voie plus classique en devenant professeur d’espagnol. Après quelques années à exercer en France, je suis retournée vivre en Espagne où j’ai démarré des études à l’école d’Art et Métiers de Cordoue. A la fin de mon cursus, je savais que je voulais faire de la céramique, sans pour autant avoir de projet professionnel précis. Je suis retournée à Paris suivre des cours auprès du céramiste Grégoire Scalabre avant de déménager à Marseille où j’avais l’opportunité d’avoir mon propre atelier. J’ai continué à travailler la céramique chaque jour, même lorsque mes enfants sont nés ! A leur arrivée, j’ai arrêté le tour au profit du moulage, qui me permettait de laisser mon travail en suspens le temps de m’occuper d’eux.
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En parallèle je me suis auto-formée à de nouvelles techniques en réalisant diverses expérimentations avec d’autres matériaux, en regardant des vidéos sur le web, à travers les livres… C’est à ce moment-là que j’ai commencé à utiliser les napperons dans mes créations. Dans ma famille maternelle, les travaux d’aiguille revêtent une grande importance : les femmes ne doivent jamais rester inactives, c’est pourquoi elles brodent et tricotent beaucoup. J’ai commencé à mixer les napperons offerts par mon arrière-grand-mère à mes céramiques. De là sont nés d’autres objets centrés autour de l’ombre et la lumière, puis tout naturellement les luminaires, réalisés en vermicelle de terre. J’ai commencé à travailler la porcelaine, qui a la particularité de devenir translucide après la cuisson, à utiliser de la dentelle pour créer des reliefs…
Que représente la céramique pour vous aujourd’hui ?
Je dirai qu’un objet en céramique est comme un moment de vie, une expression figée dans le temps. C’est pourquoi je tiens tant à fixer ces créations textiles offertes par ma famille – qui sont pour moi un véritable héritage - dans les objets que je fabrique. La céramique m’a également poussé à sortir de ma zone de confort ! Sans trop savoir si j’allais en vivre, je me suis lancée dans la création de mon entreprise avant d’exposer pour la première fois mon travail au salon Maison & Objet. Je travaille désormais essentiellement pour des boutiques mais j’ai le projet de lancer mon propre e-shop en 2017.
// Très poétiques, les luminiares en porcelaine blanche peuvent être suspendus ou posés sur un meuble //
Comment définiriez-vous votre univers ?
Je n’ai pas vraiment le recul nécessaire pour le définir mais je reste très attirée par l’organique, la simplicité, l’intime… Il est essentiel pour moi de créer une relation avec l’objet, c’est pourquoi les détails et les imperfections sont si importants. J’adhère totalement à la conception japonaise du Wabi-sabi, qui cultive l’art de « l’accident » dans la fabrication d’un objet et célèbre les marques du vieillissement. Côté créateurs, je suis inspirée par le travail de Lyndie Dourthe et de Marie Rouna, qui photographie mes céramiques depuis plusieurs années.
Réalisez-vous des mood-boards avant vos collections ?
Je ne pose jamais rien sur le papier, excepté quelques pistes de travail. Etant quelqu’un de très impatient, je réalise tout au fur et à mesure, au feeling…
// La dentelle s'imprime sur chacunes des créations de Myriam //
Quels univers / matériaux aimeriez-vous explorer à l’avenir ?
Je rêve de mélanger porcelaine et tissage, mais aussi de détourner la technique de peinture sur tissu en l’adaptant à la céramique. Au-delà de la technique, je veux avant tout continuer à donner de l’émotion !
En savoir plus : www.myriam-ait-amar.com
Credit photo : Marie Roura